J'ai toujours gardé en tête le titre de ce film et l'histoire des Ethiopiens venus en Israel(et aussi dans mon porte-monaie le ticket de cinéma du film) comme un leitmotiv de ce que je devais faire en Israel et de la raison de ma présence, va, vis et deviens comme un mantra pour passer les moments les plus difficiles parce que la vie est très loin d'être facile et que ce n'est pas le pays où coule le lait et le miel comme le disent les envoyés de l'agence juive.

Pourquoi je suis venu en Israel, encore aujourd'hui la réponse m'est difficile à définir, là n'est pas l'important, l'important est que je sois venu comme 6 millions d'autres personnes dans cette bande de terre qui est aujourd'hui comme depuis des milliers d'années, notre terre.

Chaque histoire d'olé hadash comme on nous appelle est différente, certains sont venus à pieds d'Europe avant ou après la deuxième guerre mondiale ou d'Ethiopie comme le héros du film, d'autres ont fuis le Yémen , l'Irak, l'Iran, la Syrie ou le Liban où on leur a fait comprendre que c'est soit tu te casses ou soit tu te casses, en gros ils n'avaient donc pas le choix, enfin beaucoup d'autres sont venus par choix, parce qu'ils sentaient qu'ici deviendrait chez eux, leur maison en Israel.

Pour ma part, je suis là un peu par hasard mais surtout parce que j'ai eu le coups de foudre pour ce pays comme on a le coups de foudre pour une femme passant dans la rue, dès l'instant où j'y ai mis les pieds pour la premières fois en mai 2004.

Les coups de foudre, parfois cela dure un mois, pour moi ça fait cinq ans que j'aime Israel, oh c'est sûr que comme dans tous les couples, il y a des hauts et des bas qui parfois sont très très bas, on s'engueule aussi parfois pour des futilités comme le prix des courses ou le caractère des israeliens parfois très très chiant ou très con ou pour des choses plus serieuses comme son premier ministre et son gouvernement composé pour une bonne partie de mecs qui n'y connaissent rien, ou le nombre inéxistant de canadairs pour combattre les incendies ou pourquoi Guilad Shalit n'est toujours pas rentré à la maison ou pourquoi il faudrait détruire la maison d'un soldat mort pour son pays juste parce qu'elle n'est pas placée où il faudrait, ou le système de santé très mal organisé et très cher alors que nous avons de très bons medecins ou pourquoi nous ne vivons pas en paix avec nos voisins. Mais malgré tout ça on finit toujours par se rabibocher.

Aujourd'hui après cinq ans, certains de mes amis sont prêts à repartir en France ou ailleurs, surement que d'autres qui étaient avec moi à l'oulpan d'intégration l'ont déjà fait ce voyage de retour, dont on parle ici très peu , c'est sûr que ce n'est pas très marketing d'en parler mais c'est la réalité, certains repartent parce qu'ils ont perdu les illusions à propos d'Israel qu'ils avaient en venant ici, d'autres parce qu'ils ne veulent pas élever leurs enfants dans un pays autant fracturé, où l'éducation n'est plus dans les priorités du gouvernement (malgré ses promesses), où pour chaque petite chose il faut crier et se battre, où mon voisin ne pense qu'une seule chose, que je veux l'arnaquer, où il y a le plus grand pourcentage d'avocats par habitant au monde.

Un voyage de retour peut-être dû aussi par une non intégration dans la société israelienne qui peut-être aussi volontaire, parce qu'on a pas trouvé le boulot que l'on recherchait et on en vient à ne regarder que les chaines française à la TV pour ne plus entendre parler l'hébreu parce qu'on ne supporte plus d'être ici, ou même parce qu'après un grand nombre de dates on n'a pas encore trouvé la petite feuj-israélienne qu'on cherchait et aussi pafois parce-que la famille nous manque trop, même si en venant ici on décide de quitter sa famille pour en fonder une nouvelle en Israel.

La famille est un sujet très sensible et on se demande souvent “tout ça pour ça” est-ce que ça vaut vraiment le coups? Ma famille me manque tous les jours et on ne remplace jamais sa mère mais malgré tout je reste là et je vis en Israel même si parfois on voudrait juste prendre l'avion pour la serrer dans ses bras cinq minutes.

Mais ce qui est le plus bizarre, jamais aucun olé hadash ne dirait qu'il veut partir par peur de la situation sécuritaire ou par peur de se faire atomiser par nos bons amis iraniens ou exploser par les milliers de missiles du hezb braqués sur nous. Ce qui est paradoxale, c'est que la vie quotidienne nous pose plus de problèmes que les attentats, le hamas ou le hezbollah, ou touts les jihadistes qui veulent nous jeter à la mer.

En Israel, c'est babel à chaque instant, le religieux vit avec le laique pur et dure, le génie du high-tech peut vivre au calme dans un kibboutz, le juif vit avec l'arabe, le gauchiste peut s'engueuler avec un sioniste-religieux, les homos vivent tranquiles à TLVibe au pays de la Torah, un soldat-immigré russe peut se faire sauvé la vie par un soldat venu d'éthiopie, on y parle toutes les langues du monde entier mais surtout, on a le meilleur houmous, la meilleure thrina, les falafels et les pitotes, et c'est ça qui me rassure. Israel est un carrefour remplis de diversités, et j'y vis au milieu.

Aujourd'hui, cinq ans après mon aliya, je suis venu, je vis et je deviens un peu plus tous les jours.

On dit que pour qu'Isrel nous aime , il faut l'aimer beaucoup et bien moi, je crois que même si souvent on s'engueule, je l'aime un peu plus tous les jours et que c'est ça qui compte vraiment.

Tcho .

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