En février 1972, lors d’une émission de télévision, John Lennon (1940-1980) avait été affirmatif : « Si vous cherchez un autre nom à donner au rock’n’roll, vous devez l’appeler Chuck Berry. » et Berry disait de lui-meme qu'il etait le« meilleur interprète, meilleur instrumentiste, meilleur chanteur et meilleur homme de scène ».

Proche de la trentaine quand sa carrière débute vraiment, en 1955, Chuck Berry aura chanté, parfois avec plus d’exactitude que des collègues plus jeunes, le quotidien et les rêves des adolescents et pré-adultes, combinés à des airs de pleine évidence rythmique et mélodique. Ses sujets de prédilection, la voiture et la vitesse, la drague et le désir sexuel, l’insouciance des années au lycée, le désir d’une jeunesse qui, sans encore se rebeller contre les parents, aspire à plus de liberté. Ce qui passe par son rock’n’roll tranchant, dont la forme ne variera guère. C'est vrai que quand tu ecoutes ses albums, au hasard, ca se ressembe assez mais une energie folle sort de ses notes de guitares pour te transperser le cerveau et t'inoculer le virus du rock.

Du milieu des années 1950 au milieu des années 1960, il laisse à la postérité des classiques du rock: Maybellene et Thirty Days, en 1955 ; Roll Over Beethoven, Too Much Monkey Business et You Can’t Catch Me, en 1956 ; School Days et Rock and Roll Music, en 1957. En 1958, année particulièrement féconde, ce sera Sweet Little Sixteen, le fameux Johnny B. Goode, probablement son hymne rock’n’roll le plus célèbre, Around and Around, Beautiful Delilah, Carol, Sweet Little Rock’n’Roller. Ajoutons Little Queenie, Back in the USA et Memphis Tennessee, en 1959, Let It Rock et Bye Bye Johnny, en 1960. Derniers sursauts et non des moindres, Nadine, No Particular Place to Go, You Never Can Tell, toutes ses chansons auront servies de matrice noricieres aux heritiers du British blues des annees 60 en commaencant par ses cheres Pierres qui roulent et leur fameux guitariste, Keith the chief Richards.

Notre Johnny Hallyday nationale, icone absolue du rock au pays du camembert et de la Hollandie et bientot de la Macronie, plutôt compétent dans le domaine du rock, disait il y a quelques années : « C'est Elvis qui a mis le feu aux poudres. Nous lui devons tous d'être là aujourd'hui, mais il est certain que sans Chuck Berry, nous ne serions pas là non plus. Il est l'épine dorsale du rock électrique, il a écrit les plus grands classiques du rock, que je chante toujours aujourd'hui. »

Sa carrière est stoppée net en 1959 quand il est condamné à cinq ans de prison pour proxénétisme. Chuck Berry tourne énormément dans les années 70, une moyenne de 150 concerts par an, mais cet homme est affligé d'une pingrerie légendaire. Il voyage seul. Sans musiciens. Ceux-ci sont engagés chaque soir dans la ville où il se produit. Ils ne sont pas remunérés car il estime que c'est un honneur de jouer avec lui, il n'y a pas de répétitions non plus. Les musiciens sont souvent des amateurs et les concerts sont généralement des grands moments de confusion qui laissent le public frustré, déboussolé et furieux. Lorsqu'il n'était encore qu'un jeune guitariste débutant, Bruce Springsteen eut l'occasion d'accompagner un soir Chuck Berry.

Il racontera plus tard dans Hail ! Hail ! Rock'n'Roll, le documentaire produit par Keith Richards, que Berry ne leur communiqua pas la liste de morceaux et qu'il ne vint même pas leur parler ni les remercier à la fin du concert. Pas rancunier, le Boss l'accompagna à nouveau trente ans plus tard lors de la cérémonie du Rock and Roll Hall of Fame en 1995. Il est aussi connu pour refuser de revenir faire un rappel si l'organisateur ne lui donnait pas une rallonge en liquide. À une époque, il était impossible à l'organisateur de ne pas se plier à cette exigence s'il ne voulait pas voir les fauteuils de la salle saccagés par les fans énervés ! Chuck Berry fut à nouveau condamné à quatre mois de prison pour fraude fiscale en 1979. Et en 1990, plusieurs employées de ses deux restaurants de Saint-Louis portèrent plainte contre lui, l'accusant d'avoir installé des caméras vidéo dans les toilettes pour dames. La plainte fut réglée hors tribunal.

Un bien curieux personnage, Chuck Berry, un compositeur guitariste de légende et un drole de bonhomme mais qui respirait le rock aussi bien dans l'attitude que dans sa musique. Et meme, a 90 ans il a encore trouver l'energie de faire un nouvel album, qui sera malheureusement posthume en 2017.

Jerry Lee Lewis, autre pionnier lui aussi doit bien se sentir seul sur cette planete de moins en moins rock.

Tcho,

Managueure from Bat Yam